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Joël Robuchon : « Les gens veulent bien manger, mais l’apparat les fatigue »

Publié le 21 juin 2011 dans A Table
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C’est à Saint-Christophe-des-Bardes, petite commune proche de Saint-Émilion, qu’il a choisi, le 7 avril 2011, de fêter son 66e anniversaire. Surnommé « Poitevin la Fidélité » depuis son passage chez les Compagnons du devoir, Joël Robuchon ne pouvait refuser l’invitation de son vieil ami propriétaire de vignobles et partenaire en affaires, Bernard Magrez. « Marier la gastronomie avec les vins est un art délicat. Mais la qualité de sa production est telle que trouver les bons accords entre ses bouteilles et mes plats devient presque une chose facile. » Antoine Hernandez, sommelier attitré du chef le plus étoilé du monde (1), acquiesce et enfonce le clou d’un commentaire assuré. « MM. Robuchon et Magrez sont parmi les meilleurs représentants à l’étranger de l’excellence à la française. »

Goût, vérité, simplicité sont vos maîtres mots. Votre cuisine bardée d’étoiles depuis plus de trente ans ne va-t-elle pas puiser au-delà de ces trois valeurs ?
Bien sûr, cela ne suffit pas. Il faut du talent, des équipes dévouées et solidaires et un sens aigu de la précision et de l’organisation, mais je vous assure que ma conception de la cuisine tient dans ces trois mots. C’est encore plus vrai depuis que je suis sorti de ma retraite en 2003. Ce qui m’intéresse aujourd’hui, c’est le goût naturel, les choses simples, la cuisine minute qui ne mélange pas plus de deux ou trois saveurs. Mais je ne suis pas le seul à penser de la sorte. Depuis de nombreuses années, la gastronomie française a beaucoup évolué, contrairement à ce que certains de ses détracteurs assurent. L’école Escoffier, avec ses sauces qui vous plombent l’estomac, est révolue. Notre façon de cuisiner s’est modernisée, la nourriture s’est allégée, simplifiée. À l’étranger, l’école française n’a rien perdu de son prestige. Elle reste synonyme de raffinement et d’élégance. Si vous saviez à quel point nous sommes sollicités…

Vos Ateliers sont des établissements pleinement en phase avec l’air du temps. La décoration y est épurée, le concept clairement défini et décliné. En quoi correspondent-ils à votre philosophie d’authenticité ?
J’en avais assez des ambiances lourdes, de ces établissements où l’on s’ennuie, de ces lieux où le service est guindé et où, à l’arrivée, l’addition tombe comme un coup de bambou. Aujourd’hui, les gens veulent certes continuer à bien manger, mais l’apparat, le trop sophistiqué, les fatigue. Ils veulent être à l’aise, évoluer dans une atmosphère conviviale et décontractée. C’est ce que nous essayons de proposer dans les Ateliers.

Il y a quelque chose d’espagnol dans ce concept. Comme un air de bar à tapas amélioré…
Vous savez, j’adore ce pays. J’aime la façon de vivre, joyeuse et débridée, des Espagnols. À tel point que je prends tous mes quartiers d’été, deux mois entiers, près d’Alicante. Cet amour de l’Espagne a clairement inspiré le concept de mes Ateliers, au même titre que les bars à sushis japonais, à l’ambiance inimitable. Dans ces deux pays, on cuisine souvent devant vous, les gens se parlent, regardent dans l’assiette du voisin et commandent la même chose. Ce sont des lieux vivants, des lieux d’expression et d’échanges. Ce sont aussi des endroits où l’on mange des choses simples. Dans les Ateliers, on peut déguster des tomates farcies, de l’onglet en tartare accompagné de frites à l’ancienne, de la morue à l’espagnole, du burger de foie gras au poivron…

Les produits du Sud-Ouest tiennent-ils une part importante dans votre culture gastronomique ?
Je me suis toujours vu comme un ambassadeur de ma région. Spontanément, je défends donc les produits du Poitou comme le fromage de chèvre, le cognac et le pineau des Charentes. Dans mes établissements, j’ai par exemple imposé les Moyet. J’aime aussi les fruits de mer, souvenirs des vacances de ma jeunesse à Fouras, en Charente-Maritime. On partait en camion, on retrouvait des amis pêcheurs.

Depuis que ma fille a ouvert un restaurant en Dordogne (NDLR, à Eymet, en Bergeracois), j’ai aussi découvert les fraises du Périgord. Elles sont exceptionnelles. Plus récemment, j’ai été converti à la cuisson aux sarments de vigne. Ce procédé, on m’en parlait depuis longtemps… et je n’y croyais pas. Jusqu’à ce que j’essaye une bonne côte de bœuf cuite de cette manière. J’ai été définitivement converti en Espagne, où, près d’Alicante, ils font chauffer la paella de la sorte. Les flammes viennent lécher le plat… le goût est inimitable. L’été dernier, avec mon portable, j’ai même pris des photos de ce rituel, regardez !

Le foie gras ? Les cèpes ? Produits galvaudés ?
Sûrement pas ! Récemment, j’ai rencontré un grand médecin qui m’a encore assuré que le meilleur moyen pour lutter contre le mauvais cholestérol était de manger du foie gras. Au début de ma carrière, au relais de Poitiers, on les faisait nous-mêmes. Ils arrivaient du Sud-Ouest, ils étaient exceptionnels, ne bougeaient pas. Quelques années plus tard, quand je suis monté à Paris, ça a été plus difficile. J’avais beaucoup plus de mal à les préparer, ils ne réagissaient pas pareil car ils étaient tout simplement moins frais. Aujourd’hui, avec la rapidité des transports, nous n’avons plus ce genre de problèmes. J’ai aussi une vraie passion pour les champignons. À Poitiers, toujours à mes débuts, nous vénérions les cèpes bordelais. La tête de nègre était notre caviar. Je me souviens aussi des paniers de morilles fraîchement cueillies, barbouillées de rosée et qui fumaient encore.

Vous êtes aussi un amateur de rugby. Des souvenirs de troisièmes mi-temps gourmandes ?
L’époque qui m’a le plus marqué est celle de Jacques Fouroux (NDLR, décédé en 2005, le Gersois a été sélectionneur du XV de France de 1981 à 1990). À cette époque, j’ai souvent mangé avec eux, j’avais le droit de pénétrer dans les vestiaires, c’étaient des moments forts. Pour tout vous dire, Jacques Fouroux a même élaboré certaines de ses sélections au Jamin, le restaurant que je dirigeais à Paris.

L’été est arrivé. Quel est votre menu de saison idéal ?
En entrée, une salade tomates-oignons arrosée d’un filet d’huile d’olive et quelques tranches de jamon Ibérico avec un bon verre de champagne rosé. Ensuite, j’hésite entre une paella et un poisson, bar ou rouget cuit au sel. En dessert, je choisis la simplicité : des fraises.

(1) Élu Meilleur Ouvrier de France en 1976, Joël Robuchon a obtenu sa première étoile Michelin en 1981. Deux ans plus tard, son restaurant Le Jamin en comptabilisait trois. Désigné cuisinier du siècle en 1990, le Poitevin est aujourd’hui à la tête d’une multitude de restaurants (Paris, Monaco, New York, Tokyo, Hongkong…) auréolés de 26 étoiles du fameux guide rouge.

Article de Pierre-Emmanuel Cherpentier et photo de Stéphane Klein parus dans Sud Ouest Gourmand n°9.

Tags : Bernard Magrez, Eymet, Joël Robuchon
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